Faut-il limiter l'usage des écrans par les enfants, comme le préconise le récent rapport remis à Emmanuel Macron ? Pourquoi Threads dépasse-t-il X aux Etats-Unis ? Deux sujets abordés dans ce nouvel épisode du Debrief Transatlantique avec Bruno Guglielminetti (Mon Carnet).
Un rapport remis récemment à Emmanuel Macron souligne la nécessité de protéger les jeunes des effets néfastes de l'usage excessif des appareils électroniques. Des mesures sont attendues dans un mois. Parallèlement, ce rapport est l'occasion d'un débat sur les effets réels sur le développement et l'âge à partir duquel les enfants peuvent être confrontés aux contenus en ligne.
Nous abordons également l'essor de l'application Threads aux États-Unis, qui dépasserait désormais l'audience de X. Un phénomène qui s'explique notamment par le lien du nouveau réseau social avec Instagram. Cependant, malgré un potentiel marketing certain pour les professionnels des médias sociaux, Threads comporte encore des lacunes techniques.
Extrait de L'Hebdo du 4/5/24
Bruno Guglielminetti:
[0:05] Il aurait fait toc, toc, toc. Moi, je fais coucou, coucou, coucou. Salut, Jérôme Colombin.
Jérôme Colombain:
[0:10] Salut, Bruno Guglielminetti. Ça ne s'arrange pas, nos entrées en matière.
Bruno Guglielminetti:
[0:15] Il faut se dépasser de semaine en semaine. Et comme tu mets la barre très haute, j'essaie de trouver quelque chose. Jérôme, je te retrouve en Floride encore cette semaine. T'as décidé de t'installer, toi?
Jérôme Colombain:
[0:25] Non, je n'ai pas décidé de m'installer, même si ça me tente, je ne te le cache pas. Mais non, non, on en parlait déjà la semaine dernière. Effectivement, je poursuis mes vacances. mais voilà c'est pas vraiment des vacances puisque tu m'as convoqué au micro tu m'as dit bon allez rendez-vous pour enregistrer bon bon d'accord alors voilà je suis là quoi non.
Bruno Guglielminetti:
[0:43] Mais je prends pas tout le blanc parce qu'il y a quand même Joshua Benjo qui voulait te parler.
Jérôme Colombain:
[0:46] Alors voilà cette interview exceptionnelle avec monsieur Joshua Benjo, effectivement une date et un rendez-vous avec Joshua Benjo ne se refuse pas donc on fait tout comme ça, on fait tout en ce moment ben on va en parler je pense dans un instant de cette interview Oui.
Bruno Guglielminetti:
[1:03] On va entendre l'entrevue qu'on a faite. Mais écoute, si je te dérange en plus…, Je t'en prie, je t'en prie.
Jérôme Colombain:
[1:10] Assieds-toi, viens, je te fais un café.
Bruno Guglielminetti:
[1:12] OK, merci. Deux sucres, un lait, s'il te plaît. Donc, c'est ça. Si je voulais te parler, juste avant qu'on entende l'entrevue, c'est qu'en France, je sais que tu n'es quand même pas si déconnecté que ça, il y a le président français qui vient de recevoir un rapport fait par une commission très sérieuse qui, maintenant, si je prends les grandes lignes, dit tout simplement pas d'écran pour les enfants de moins de 3 ans. À 13 ans, on peut leur donner un téléphone. À 15 ans, on peut les brancher sur les réseaux sociaux. Et puis, bonne chance.
Jérôme Colombain:
[1:45] Oui, c'est vraiment ça. C'est bonne chance. Oui, oui. Mais écoute, c'est intéressant effectivement cette news. J'en ai parlé dans la séquence actue de Monde numérique cette semaine parce que c'est assez incontournable. Et c'est intéressant, à mon avis, à plusieurs titres. Parce que d'abord, il y a le côté, qu'est-ce qui va se passer? Puisque maintenant, après ce rapport, Emmanuel Macron a demandé au gouvernement de faire des propositions concrètes pour mettre en application ces recommandations. Mais ce qui est également intéressant, c'est le débat que ça lance, parce que du coup, il y a beaucoup de discussions, d'interrogations, à la fois sur les réseaux sociaux et dans les médias. On entend des experts, on entend des politiques, on entend des gens…, de simples utilisateurs, parce qu'on est tous concernés évidemment par cette question, et chacun donne son avis et chacun a un peu sa vision des choses.
Jérôme Colombain:
[2:36] Et la vision, il y a des choses sur lesquelles tout le monde est d'accord,
Jérôme Colombain:
[2:40] et puis d'autres, on n'a pas forcément l'unanimité. Ce sur quoi tout le monde est d'accord, c'est le fait qu'il faut protéger, notamment les tout petits enfants, des excès des écrans. Quand on voit, on l'a tous vu dans des restaurants, des familles qui, par facilité, confient un iPad à un petit enfant, mais vraiment un petit, à moins de 5 ans ou moins de 7 ans, et le laissent comme ça pendant des heures dans son monde sans lui adresser la parole. Et si ce type de scène se répète, on sait que ce n'est pas bon. Même si, et ça le rapport, c'est intéressant, parce que quand on consulte un peu ce rapport, on s'aperçoit que les experts n'ont pas réellement relevé de conséquences sur le développement des enfants, ce qui est plutôt une bonne nouvelle d'une certaine manière. En revanche, quand il y a une addiction très forte, eh bien, ça pose d'autres problèmes, de sédentarité, donc d'obésité, de problèmes de concentration, de manque de sommeil, etc. Donc, la question, c'est qu'est-ce qui va ressortir de tout ça, en fait?
Bruno Guglielminetti:
[3:41] Mais Jérôme, je vais me faire de l'avocat du diable, que je connais très bien. Il n'y a pas quand même un déplacement du problème, C'est-à-dire qu'à une autre époque, qui était la nôtre quand on était plus jeunes, là, les parents se faisaient regarder parce qu'ils laissaient les enfants de la télé. On disait que la télévision était devenue la gardienne des enfants. Là, c'était l'iPad qui est beaucoup plus mobile ou carrément le téléphone portable. On déplace le problème. L'idée, c'est qu'on est toujours quand même à positionner des enfants devant quelque chose, que ce soit le téléphone, que ce soit la télé.
Jérôme Colombain:
[4:18] Oui, mais c'est toujours le même problème. Et ça ne veut pas dire que parce qu'on est passé d'un écran à un autre type d'écran qu'il n'y a pas de problème. C'était déjà un problème de laisser des tout petits enfants très longtemps, tout seuls devant un écran de télé. Donc, c'est la même chose.
Bruno Guglielminetti:
[4:35] Oui, mais tu as quand même pas mal tourné.
Jérôme Colombain:
[4:37] Écoute, moi, je n'ai pas passé tant de temps que ça devant la télé. C'est une question de génération. Mais non, non. Je pense que ça dépend, il faut le dire, ça dépend beaucoup des milieux, de l'attention que les parents peuvent prêter, ont le temps de prêter à leurs enfants. On le sait, par exemple, et ça surprend beaucoup de monde, mais dans les familles des géants de la tech, des grands de la tech, les parents sont... Alors, ce n'est pas pas d'écran, Mais c'est une pratique très réglementée, très surveillée. Pourquoi? Parce que ce sont des milieux favorisés, avec des parents qui font extrêmement attention à l'éducation de leurs enfants. Et dans cette démarche-là, eh bien, ils essayent de les préserver des excès, en fait.
Bruno Guglielminetti:
[5:19] Oui, mais permets-moi d'être une langue sale et de dire qu'ils ont aussi le personnel pour les encadrer.
Jérôme Colombain:
[5:23] Oui, bien sûr. Non, mais il y a toutes ces raisons-là. Oui, évidemment, évidemment. Mais ça compte. Alors après, sur ce que je te disais, il y a une partie débat qui est intéressante aussi. C'est qu'il y a des gens qui disent, oui, mais par exemple, interdiction du smartphone jusqu'à 15 ans, c'est une aberration. Et je ne suis pas loin de penser la même chose parce que tu ne peux pas non plus couper les jeunes de cette génération-là, de leur vie sociale et de ce
Jérôme Colombain:
[5:47] qui fait le monde d'aujourd'hui. Il y a des jeunes qui aujourd'hui, en plus après ils font des carrières dans le numérique etc tu peux pas attendre qu'ils découvrent le smartphone, internet ou même les réseaux sociaux à 18 ans, ça paraît débile, donc c'est vraiment une question de curseur, c'est extrêmement délicat et moi je me demande vraiment ce que les pouvoirs publics vont pouvoir mettre en place parce que je pense qu'il va falloir une partie de mesures très, draconiennes, très autoritaires, par exemple dans les écoles mais c'est déjà le cas, dans les écoles on n'autorise pas l'usage du smartphone pendant les cours etc mais il faudra peut-être aller plus loin, peut-être dans des lieux publics il y a une mairie en France une ville une petite commune en France qui a interdit l'usage du smartphone, mais également pour les adultes, pour les enfants et pour les adultes, pour tout le monde, dans les lieux publics. Peut-être qu'il faut aller vers ce genre de mesures autoritaires à certains moments, dans certains contextes. Et puis après, c'est une question un peu de prise en main de chacun à titre individuel.
Bruno Guglielminetti:
[6:45] Mais tu vois, la France n'est pas tout seule à essayer de trouver un encadrement qui serait correct. Je pense à l'Ontario, qui est la province voisine du Québec, où là, on est en train de resserrer les règles sur l'utilisation du téléphone cellulaire dans les écoles. L'Ontario, hier, donc cette semaine, a statué que maintenant le téléphone serait interdit toute la journée dans les écoles primaires et pendant les heures de cours au secondaire et les médias sociaux seront bannis, barrés, exclus des réseaux Internet des établissements. Alors, c'est pour te dire comment on veut, c'est une approche drastique, mais donc on veut que les jeunes, lorsqu'ils sont à l'école, puissent se concentrer sur leur étude.
Jérôme Colombain:
[7:33] Bien sûr, mais ça, ça paraît, c'est difficile de critiquer ça,
Jérôme Colombain:
[7:37] ça paraît tellement évident.
Bruno Guglielminetti:
[7:39] Non, c'est ça, mais ça au moins, c'est une base. Là, après, par la suite, carrément d'exclure les adolescents de leur vie sociale qui s'est dépopée sur les réseaux sociaux, je trouve ça extrême. de l'enseignement ?
Jérôme Colombain:
[7:49] Ah non, mais moi, j'ai des amis, enfin, je n'en ai pas beaucoup que comme ça, mais je pense notamment à un ou deux amis qui, lui-même, est complètement déconnecté, enfin, il n'a pas compris qu'on avait changé de monde et qu'on était passé dans un monde numérique. Il ne va pas sur les réseaux sociaux et il diabolise les réseaux sociaux aux yeux de ses enfants. Et donc, il a freiné des cas de fer avant de leur offrir un smartphone, freiné des cas de fer avant d'accepter qu'ils s'inscrivent sur des réseaux sociaux et aujourd'hui, il a un discours cours extrêmement négatifs, sans aucune collaboration avec ses enfants, alors que tout cela, ça se passe dans le dialogue, dans la mise en garde, etc.
Bruno Guglielminetti:
[8:28] Aïe, aïe, aïe. Dis donc, question plus légère, mais tout de même à propos. Maintenant que tu es aux États-Unis, on va laisser planer le doute, si un jour tu vas retourner en France, est-ce que tu utilises plus « treads » que « x » maintenant que tu es là-bas? Parce que là, on vient de voir les chiffres.
Jérôme Colombain:
[8:46] Ah, je sais pourquoi tu me demandes ça.
Bruno Guglielminetti:
[8:48] Oui, pourquoi?
Jérôme Colombain:
[8:49] Parce qu'apparemment, ça marche bien aux États-Unis, Threads.
Bruno Guglielminetti:
[8:53] Je comprends. Threads vient de détrôner X au niveau du nombre d'utilisateurs, particulièrement sur le territoire américain. Alors, je me demande si c'est dans l'eau, si c'est dans l'air. Est-ce que tu ressens le besoin d'aller Threadser sur ton téléphone?
Jérôme Colombain:
[9:10] Moi, personnellement, pas vraiment, je vais te dire. Ça n'a pas changé grand-chose. Là, je crois que depuis que je suis là, je suis allé une fois ou deux sur Threads. Peut-être parce que j'avais un peu plus de temps que d'habitude et c'était plus pour m'occuper qu'autre chose, mais je n'ai pas perdu mes bonnes vieilles habitudes et notamment tout le temps que je passe sur X principalement, même si je m'énerve de plus en plus par rapport à X, mais bon, ça, comme tout le monde, on en devient complètement, c'est vraiment une espèce de crack abominable, ce réseau social, on en veut toujours plus, on y retourne et on sait que c'est dégueulasse, c'est de pire en pire, on est confronté à des contenus qu'on déteste,
Jérôme Colombain:
[9:46] Enfin, bon, tout le monde s'engueule au bout du deuxième commentaire. Enfin, c'est intolérable. Mais pourquoi ce boom de threads, selon toi, aux États-Unis?
Bruno Guglielminetti:
[9:57] Écoute, je pense que la stratégie de Zuckerberg d'amener cet outil-là par le biais d'Instagram, je pense que ça a réussi. C'était comme le cheval de Troyes qui est implanté. Puis là, bon, on fait vouler. Puis surtout qu'au niveau de l'utilisation, de l'expérience utilisateur, d'arriver sur un nouveau réseau et d'avoir déjà des gens qu'on peut suivre c'est pas banal ça parce que sur Blue Sky ou sur, Mastodon il faut repartir à zéro C'est ça qui est laborieux. Quand on est habitué d'avoir une expérience sur X, où on a déjà des gens, il y a déjà un réseau social qui est là, de repartir un nouveau truc, c'est un peu laborieux. Alors là, on arrive sur Threads, c'était vraiment habile. Il y a une importation des abonnements qu'on avait sur Instagram. Donc, ceux qui sont déjà sur Threads, automatiquement, on les suit. Et puis c'est pour ça que de temps en temps on en voit un débarquer à la dernière minute j'ai déjà des abonnés, j'ai déjà des abonnements c'est ça, c'est la formule que Meta a choisi oui.
Jérôme Colombain:
[11:04] C'est un super accélérateur et ça c'est très malin maintenant je trouve que Threads est technologiquement en retard, plein de points de vue, il y a plein de choses qu'on ne peut pas faire sur Threads je ne sais pas si on peut mettre des vidéos maintenant à un moment on ne pouvait pas on peut, c'est sur BlueSky qu'on ne peut pas, Mais puis l'algorithme est assez bizarre. Moi, je me retrouvais toujours avec des choses qui ne m'intéressaient pas du tout et qui étaient même vraiment très loin de ma sphère. Donc, en termes de recommandations, ce n'était pas ça. Mais je crois que d'un point de vue marketing, en revanche, c'est un outil qui devient assez intéressant. Pour les professionnels, j'entendais des retours de la part de professionnels des médias sociaux, de la communication, des marques, etc. Il y a des choses intéressantes, parce qu'on retrouve en fait toute la force de frappe publicitaire de méta, avec la possibilité d'adresser des groupes de manière extrêmement fine, d'avoir des retours et des métriques très intéressantes. Donc, ce n'est pas étonnant quelque part que ça monte. La question, c'est de savoir si c'est du long terme et à ce moment-là, si ça pourrait réellement mettre en danger X.
Bruno Guglielminetti:
[12:14] C'est savoir si ça va durer oui tout à fait je pense que c'est dans la, durée qu'on va voir ce combat arriver mais je trouve certain que c'est pas vraiment une bonne nouvelle pour Elon Musk de voir que sur le territoire américain qui a toujours été un peu le marché, amiral de la plateforme de voir qu'il est en perte de vitesse mais il.
Jérôme Colombain:
[12:37] L'avait senti Elon Musk parce que rappelle-toi il était très énervé au moment où Zuckerberg a annoncé le lancement de Threads parce qu'il avait immédiatement perçu le fait que ça pourrait être un concurrent.
Bruno Guglielminetti:
[12:48] Sérieux c'est pas à ce moment là qu'il avait il avait lancé le défi du combat, je crois oui tu as raison oui oui absolument voilà.
Jérôme Colombain:
[12:58] Bon ben écoute je pense qu'on va s'arrêter là je te dis à la semaine prochaine mon cher Bruno.
Bruno Guglielminetti:
[13:02] Salut Jérôme.